La
culture musicale et le genre de vie des Bauls a inspiré
la vie dans les villages du Bengale dune façon
très profonde et, en retour, les Bengalis protègent
depuis des siècles les chanteurs mystiques baul.
Au XIIIe siècle, le grand chanteur baul Chaitanya
Mahaprabhu était très connu et il voyagea
dans toute lInde. Il est demeuré une des
sources dinspiration majeures pour les poètes
et les chanteurs baul des générations
suivantes.
Le nom " Baul " fait allusion à trois
termes : betul, qui signifie " fou ", "
à contre-temps ", vayu, " air ",
qui désigne aussi le flot dénergie
interne qui donne vie et harmonie à tout être
vivant ; et auliyâ, un mot dorigine arabe
qui veut dire " saint ", " ascète
". Les Bauls viennent de milieux aussi bien hindous
que musulmans ; dans les deux cas, ils sont généralement
des rebelles contre les pratiques orthodoxes et les
institutions sociales. La raison en est purement spirituelle
: ils sont en perpétuelle quête de Adhar
Manush, " lHomme essentiel ", lêtre
intérieur qui réside en chaque corps
humain, et cette recherche de lamour fou transcende
toute frontière.
La voie des Bauls conçoit la poésie,
la danse et le chant comme des outils permettant datteindre
ce but. Cest pourquoi les Bauls errent de village
en village et chantent pour les gens en échange
dune aumône qui leur permettra de subsister.
On dit que les Bauls nacceptent que le strict
minimum et quils refusent ce dont ils nont
pas réellement besoin. Leurs seules possessions
sont leurs vêtements et leurs instruments de
musique, auxquels il faut ajouter leurs chants et
leurs pratiques secrètes.
Le costume des Bauls est très simple : ils
portent souvent des habits couleur safran ou couvrent
leur corps - des épaules aux jambes - dune
longue pièce de patchwork en coton ; ils couvrent
leur tête dun turban et tracent des signes
rituels sur leur front. Quant aux Fakir Bauls, ils
préfèrent le coton blanc uni.
Encore aujourdhui, les Bauls vivent dans de
petites huttes ; ils vivent en couples, mais ne sont
pas censés avoir denfants : ils adoptent
souvent des enfants abandonnés, auxquels ils
enseignent tout ce quils savent. Deux fois par
jour, ils se rendent dans les villages pour y collecter
de la nourriture (surtout du riz et des légumes).
Parfois ils voyagent afin de rencontrer dautres
Bauls. La plupart dentre eux sont aussi rattachés
à des maîtres non bauls, qui leur enseignent
différentes pratiques spirituelles (sadhana)
et des chants à la signification mystique.
Anciens ou récents, les vers des la poésie
baul comportent toujours des enseignements secrets
liés à lascèse et au comportement
juste.
Le lieu où vivent les Bauls est appelé
akhra ; il est semblable à un ashram, à
la différence près quhommes et
femmes y vivent ensemble, se considérant mutuellement
comme des partenaires spirituels.La plupart des akhra
sont aussi des lieux de rencontre pour dautres
sadhaka et sadhika, ascètes des deux sexe,
ainsi que pour les mystiques errants appelés
sadhu, quelle que soit leur origine. Chaque année,
les Bauls organisent par ailleurs une grande réunion
où ils ont la possibilité déchanger
leurs chants, leurs expériences et leurs enseignements
spirituels.
De nombreux maîtres bauls sont aussi des poètes
; Lalan Fakir, lun des plus fameux, étant
en même temps un révolutionnaire et un
saint homme ; il a composé plus de 5000 poèmes
chantés. Dans cette poésie, le sens
extérieur paraît parfois très
matérialiste ; mais la signification intérieure,
qui nest pas accessible à tous, comporte
des enseignements relatifs à des notions comme
sristhi tattva (la doctrine de la création
du monde), atma tattva (la doctrine de lâme),
deha tattva (la doctrine du corps) ou prem tattva
(la doctrine du cur).
Le style vocal des Bauls est lié à la
culture populaire du Bengale, des tribus aux villages
et même des villes. Mais les Bauls ont leur
style propre appelé baul sûr, au sein
duquel les variantes individuelles et régionales
demeurent souvent très marquées. Les
Bauls chantent et dansent ensemble de telle façon
que lesprit se mêle harmonieusement à
lâme. Dans leur corps dansant, lénergie
devient fluide et intense, et ce processus dynamique
efface lego : seule subsiste la conscience baul.
Les
instruments de musique des Bauls
-
Ektara : monocorde relié à
une peau à la base dun bol.
-
Duggi : timbale fait dun petit pot de
terre couvert dune peau.
-
Gopi yantra ou ananda lahari : instrument
à deux cordes de tension variable, joué
avec un plectre.
-
Dotara : luth tendu de quatre à sept
cordes, seules deux dentre elles étant
jouées.
-
Sarinda : vièle à quatre cordes,
très populaire dans le nord du Bengale, surtout
jouée par les Fakir Bauls musulmans.
-
Kartal : paire de petites cymbales.