L’Océan Indien est aujourd’hui
un espace éminemment pluriculturel, où les
influences africaines, malgaches, arabes, indiennes et européennes
se croisent et s’entremêlent en des métissages
colorés, multiples et souvent inextricables. Les
quelques témoignages que nous en présenterons
dans ce programme n’en fourniront qu’une idée,
mais ils ouvriront quelques fenêtres et donneront
peut-être à certains l’envie d’en
découvrir plus par eux-mêmes.
Politiquement, La Réunion et Mayotte
sont certes françaises ; mais culturellement, ce
sont les terres de toutes les rencontres, de toutes les
créolités… Quant à la grande
île de Madagascar, à laquelle nous consacrerons
deux soirées, elle est d’une richesse inouïe,
non seulement par sa faune et sa flore, en grande partie
uniques au monde, mais également dans sa culture
et sa musique, qui ne sont pas en reste pour ce qui est
de l’originalité et de la diversité.
Ce cycle de concerts, complété
par deux films et une conférence, est par ailleurs
l’occasion de poursuivre une collaboration fructueuse
entre Genève et Meyrin ; la soirée finale
sera en effet dédiée à une Maison du
monde malgache, présentée au Théâtre
Forum Meyrin.
La présence de l’islam est
forte sur l’île de Mayotte. On y rencontre des
pratiques spirituelles qui s’inscrivent dans l’esprit
du soufisme, comme les chants et danses appelés debaa,
pratiqués exclusivement par les femmes et les jeunes
filles. Alignées, vêtues de la tenue blanche
traditionnelle, parées de leurs plus beaux atours,
les femmes exécutent leur chorégraphie en
se balançant au rythme des tambours, tantôt
assises, tantôt debout, pour évoquer le mouvement
des vagues de l’océan en une longue ondulation
aux courbes sinueuses.
Tirés des livres sacrés,
les chants du debaa, en langue arabe, s’adaptent à
différents contextes. Ils se font chants de louange
lorsque les danseuses accueillent les pèlerins à
leur retour de la Mecque ; ils deviennent rites expiatoires
durant la période du Ramadan. La mélodie chantée
par la soliste est inlassablement reprise par le chœur,
tandis qu’un ensemble féminin de percussions
les accompagne de ses figures rythmiques aux timbres variés.
Théâtre
de l’Alhambra
10, rue de la Rôtisserie – Genève
Conférence
Liens historiques et affinités
musicales dans l’Océan Indien
par Victor Randrianary
Dans l'étendue de leurs différences, les peuples
des îles de l'Océan Indien occidental partagent
une histoire et, dans une certaine mesure, une culture.
L’ancienne civilisation de Madagascar et de l’archipel
des Comores est issue de la rencontre entre l’Afrique,
le monde indo-mélanésien, le monde arabe et,
enfin, l’Europe. Et à l’est de Madagascar,
les îles dites créoles (La Réunion,
Maurice, Rodrigues et les Seychelles) ont une histoire plus
brève, ne remontant qu’à la période
coloniale.
La musique est peut-être le meilleur indice d’une
mémoire commune. Elle témoigne des emprunts
culturels et de leur assimilation, ainsi, aujourd’hui,
que des nouveaux processus nés de la renaissance
de certains genres musicaux et de l’acquisition de
formes identitaires inédites.
Victor Randrianary est ethnomusicologue. Il a longtemps
travaillé sur les musiques de Madagascar, se familiarisant
ensuite avec les pratiques musicales des Comores. Depuis
2000 il a effectué plusieurs séjours de recherche
à La Réunion pour étudier le maloya
et les danses mahoraises, ainsi qu’à Mayotte,
où il s’est particulièrement intéressé
au genre féminin debaa. C’est le fruit de ces
travaux qu’il nous livrera au cours de cette brève
rencontre.
Vendredi 7 mai, 20h30
Théâtre de l’Alhambra
10, rue de la Rôtisserie – Genève
SALALA et TIHAREA
Première
partie :
SALALA
Mbasalàla Zafimaneva dit M’Bassa
: chant, danse
Bereziky : chant, luth kabôsy, danse
Benjamin Casimir dit Kazy : chant, hochet katsa, tambour
langoro, danse
Extrait audio
Salala et Tiharea sont deux trios vocaux,
l’un masculin et l’autre féminin. Ils ont
développé une expression ancrée dans
la culture du sud de Madagascar, et plus particulièrement
dans celle du peuple Antandroy, « ceux du pays épineux
», qui vit majoritairement dans cette région
aride et rocailleuse. Fondé en 1983 par M'Bassa, Salala
(dont le nom signifie « espérance ») propose
une musique créative, influencée par les anciens
chants populaires, en particulier le beko, un genre lié
aux cérémonies funéraires traditionnelles.
A cappella ou accompagnés d’un luth ou de percussions,
les chants de Salala laissent une large part à la spontanéité
et à l’improvisation du moment.
Quant aux trois chanteuses de Tiharea, elles
interprètent de splendides polyphonies dont émergent
d’étonnants effets vocaux : accents gutturaux,
halètements ou raclements de gorge. Par leur chant,
elles décrivent volontiers la situation des femmes
dans la société malgache. Leur féminité
s’affirme de façon ironique lorsqu’elles
s’attristent sur la disparition des « vrais hommes
», ou plus douloureuse quand elles content les rivalités
entre les épouses d’un polygame. Pour Tiharea,
le chant est un remède contre les maux de l’âme,
la jalousie ou la lâcheté. Cette soirée
nous fera découvrir une musique aux accents rares,
faite de surprises et d’émotions fortes.
Vidéo Tiharea
Samedi 8 mai, 18h30
Théâtre
de l’Alhambra
10, rue de la Rôtisserie – Genève
Cinéma : LIGNE
PARADIS
Film de Luc Bongrand
(2004 - France – 53’)
Voyage initiatique au cœur des percussions
du maloya dans les pas de Firmin Viry, musicien mais aussi
un peu chamane, à cheval entre plusieurs cultures
: africaine, malgache, indienne et européenne. Firmin
Viry incarne cette âme réunionnaise faite de
métissage et d’ouverture à l’altérité.
Il nous présente ses amis, les vieux compagnons de
résistance du temps où le maloya était
interdit, les jeunes qu’il a formés, ceux qui
ne montent pas sur scène mais possèdent un
savoir particulier, un savoir qui recouvre les multiples
aspects d’une musique aux accents variés, reflet
de l’histoire, des mouvements migratoires et des identités
d’origine. Le film se situe sur plusieurs plans, celui
de la collecte et de la transmission d’un patrimoine
identitaire, et celui d’un voyage dans l’imaginaire
et l’espace.
Samedi
8 mai, 20h30
Théâtre
de l’Alhambra
10, rue de la Rôtisserie – Genève
RENÉ LACAILLE Bal Séga de La Réunion
Extrait audio
Le CD Cordéon - Kaméléon
a reçu le Grand Prix du disque 2009 de l'Académie
Charles Cros (catégorie Musiques du Monde)
Le séga est avec le maloya le genre
majeur de La Réunion et d’autres îles
de l’Océan Indien. Pour chacune de ces îles,
le séga diffère dans son style, mais il se
danse toujours en se déhanchant, l’homme tournoyant
autour de la femme. La musique, qui s’est développée
d’abord parmi les esclaves, s’est ensuite nourrie
des quadrilles parisiens que dansaient les propriétaires
des plantations et leurs familles.
Figure emblématique de la scène
réunionnaise, René Lacaille est issu d’une
lignée de musiciens. Dès l’âge
de sept ans, il accompagne son père aux percussions
dans les « bals à poussière »,
avant de découvrir la guitare et le saxophone, avec
lequel il signe son premier tube, Sax séga. Fondateur
du groupe Caméléon avec le poète et
chanteur Alain Peters, il s’installe en métropole
et s’impose comme auteur-compositeur multi-instrumentiste
: chanteur, accordéoniste, guitariste vagabondant
parfois du charango au ukulélé … Il
aime les sonorités et les rythmes métissés,
comme l’attestera son concert détonnant, mêlant
des thèmes traditionnels, ségas ou maloyas,
flirtant avec le blues, la samba ou toute autre musique
capable d’émouvoir.
Film de Marie-Clémence
et César Paes (1989 – France – 63’)
Marie-Clémence et César
Paes ont choisi une forme narrative d’une grande originalité.
Les contes dévoilés par ses habitants s’unissent
aux tranches de vie filmées. L’intimité
entre les réalisateurs et ses habitants nous permet
de partager des moments d’intense émotion.
Ils nous ouvrent les portes d’une culture jusqu’alors
inconnue. Les images sont d’une beauté rare
et nous plongent au cœur des traditions malgaches.
Comment la Terre et le Ciel se sont disputés les
hommes, pourquoi le riz est arrivé sur l’île,
comment s’est fait la répartition des biens
entre les hommes et les femmes. Un périple entre
le réel et l’imaginaire, teinté d’humour
et de tendresse qui prend le parti de la tradition orale
pour raconter la culture malgache.
Concert à 20h30
NY MALAGASY
ORKESTRA
Grands solistes de Madagascar
Ny Malagasy Orkestra – littéralement
l’Orchestre de Madagascar – réunit dix
musiciens créateurs, tous habitants de la Grande
Ile, pour une rencontre au sommet de la musique malgache.
Ce témoignage vivant des traditions de l’île,
revisitées par de grands interprètes (certains
déjà confirmés, d’autres en devenir
!) au sein d’une seule et unique formation, est placé
sous la direction musicale de Justin Vali, considéré
comme le plus grand maître actuel de la valiha, cithare
tubulaire en bambou emblématique de Madagascar.
Creuset naturel des musiciens malgaches
issus de la tradition, Ny Malagasy Orkestra, n’exclut
pas les influences de la « sono mondiale ».
Ouverts aux courants esthétiques qui circulent déjà
depuis longtemps d’un continent à l’autre,
la démarche du groupe apporte une pierre nouvelle,
ciselée et inventive, à l’édifice
du patrimoine musical malgache. Chaque membre de l’Orkestra
porte une tradition musicale régionale spécifique,
vivante, qui ne manque pas de se ressourcer dans l’édification
d’un répertoire commun.
Le billet d’entrée
du concert donne accès au film et à un buffet-dégustation
de spécialités malgaches à 19h30
Programmation : Laurent Aubert,
en collaboration avec Victor Randrianary Suivi de production : Inge Sjollema Administration : Nicole Wicht Site internet : Astrid Stierlin Documentation, audio et vidéo :
Fabrice Contri Photographies : Zinaha Andriambololoniaina,
Thierry Bongarts Lebbe, Aurelia Sevestre, Willy Vainqueur,
d.r. Technique son : Hans Fuchs Technique : Equipe de l’Alhambra Partenaire : Théâtre Forum
Meyrin Graphisme : Tassilo
ALHAMBRA
Prix des places :
35.- FS Plein tarif
25.- FS Membres ADEM, AMR & Amdathtra, Amis du SAMEG,
chômeurs, AVS
15.- FS Etudiants, jeunes
10.- FS Enfants jusqu’à 12 ans, carte 20 ans/20
francs
Location : Service Culturel
Migros, Stand info Balexert ; Migros Nyon-La Combe Billetterie en ligne :
www.forum-meyrin.ch Renseignements : tél. 022 989 34
34
Concerts organisés avec le soutien du Département
de la culture de la Ville de Genève, du Département
de l'instruction publique de l'Etat de Genève, de
la Direction du Développement et de la Coopération
DDC